A Retromobile...
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BMW M535i."


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Avaleuse de bitume."
On la connaît tous comme la voiture de Jacques Mesrine, la BMW Série 5 qui naît en 1972 est pourtant au départ une "simple" berline familiale huppée au tempérament affirmé. Mais douée d'un comportement joueur et de mécaniques affûtées, elle deviendra la monture préférée de bien des gangsters.
Cette génération porte le nom de "E12" en interne et elle passe le relais en 1981 à un nouveau modèle, la "E28". En réalité, c'est une mise à jour de la version initiale, sa ligne semble inchangée à quelques détails près comme la disparition de nombreux chromes et d'autres broutilles qui lui donne un aspect plus moderne.
A cette époque, BMW à traversé comme tout le mode la crise du milieu des années 70, si la marque de Munich s'en est bien tirée, elle préfère ne pas lancer un modèle totalement inédit et trop coûteux. Ce gros lifting est donc un choix assumé mais qui ne gênera à aucun instant une clientèle n'aimant guère les grands bouleversements.
Pour le reste c'est la même auto avec ce style qui fait mouche. Nez pointu, double paire de phares sévèrement enfoncés dans la calandre et double haricots inclinés vers le bas, la Série 5 est une vraie BMW, elle dévore le bitume! Le profil typique de la marque reste fidèle à lui même, pas de chichis, un simple pli le long de la caisse parfaitement horizontale et une découpe des vitres arrières qui signent le style BMW avec ce léger retour en bas des vitres de custode. L'arrière ne fait pas non plus dans le sensationnel, de larges et épais blocs optiques entourent la plaque d'immatriculation, simple et efficace mais c'est sous cet angle que la "E28" se distingue le plus de la "E12". En fait, la Série 5 est une grosse Série 3 et en reprend tous les codes.
On retrouve la même identité dans l'habitacle avec des plastiques costauds et une planche de bord simple et ergonomique légèrement orientée vers le pilote, ça aussi est typique des BMW de cette époque. Pour le reste on conserve une auto spacieuse et confortable aux sièges fermes, on est bien loin du moelleux d'une Renault 30 où du "Dunlopillo" d'une Citroën CX.
Sous le capot là aussi on oublie les Françaises, BMW reste le roi incontesté du "six en ligne", même si en entrée de gamme on a droit des blocs quatre cylindres qui sont loin d'être apathiques.
Si côté carrosserie vous n'aurez aucun choix hormis la berline tricorps, vous aurez plus de possibilités avec le nombre incroyable de moteurs proposés. De la 518 de 90 chevaux à la M5 de 286 chevaux, l'offre est XXL! Comparée à la "E12", la gamme a sensiblement fait baisser les consommations, même si la crise est derrière, le prix du carburant ne s'est pas pour autant éffondré. Mais pour profiter au mieux de ce modèle, il faut impérativement opter pour un six cylindres sont la réputation et la musicalité ne sont pas une légende.
Au sommet de la gamme est dévoilé en 1984 la M535i, la puissante berline est faite pour cannibaliser la voie de gauche des "autobhan" avec son six cylindres en ligne au velouté incomparable. Ah, ils étaient nombreux les jeunes pères de famille à en rêver mais beaucoup devront se contenter de leur brave R18. BMW va mettre à contribution son département Motorsport pour en élaborer cette version épicée qui apparaît pour la première fois au salon de Paris 1984.
Pour se démarquer, le département "M Technic" va la doter d'un kit carrosserie très en vogue à l'époque mais diablement kitsch aujourd'hui! Ah le tuning Allemand des années 80, la référence, il sera dupliqué et copié partout avec souvent bien mauvais goût. Sur la M535i, il s'offre un épais bouclier avant intégrant une jupe perforée d'écopes d'aérations entièrement peint dans le ton de la carrosserie et intégrant des feux additionnels. Des bas de caisse sont posés en partie inférieure afin d'en abaisser visuellement l'assise. Un petit aileron noir est collé sur la malle et le bouclier arrière moulé d'une pièce et entièrement peint laisse passer une double sortie d'échappement côté droit. C'est vrai que le kit n'est pas monstrueux où envahissant mais sincèrement, il dénature à mes yeux sérieusement le style de la voiture. A cela s'ajoute des filets latéraux et d'inévitables jantes en alliage à faux écrou central qui là encore sont fortement datées. La monte en Michelin TRX est elle aussi une mode des années 70/80 qui fait exploser le budget pneumatiques de nos jours.
Quoi qu'il en soit, l'ensemble améliore de quelques points de coefficient aérodynamique, ce qui n'était pas un mal.
L'ambiance intérieure ma fait penser à cette matinée grise, froide et humide, comme on s'habitue à en voir dans ces feuilletons Allemands. Mais dans cette version, l'équipement est complet, climatisation, ABS, fonctions électriques, il fallait aussi justifier d'un tarif qui picotait un petit peu. Mais à part des sièges signés "Recaro" portant les broderies "M Technic" ainsi que le volant et un pommeau de levier de vitesse aux même couleurs, peu de choses diffèrent de la 528i de votre PDG.
La différence se fait sous le capot où elle hérite du moteur du coupé 635 CSi, un six cylindres en ligne 3430 Cc affichant 218 chevaux. attention, cette version n'est pas pour autant une véritable sportive, c'est une berline qui en a sous le pied et qui s'exprime haut dans les tours. Ses performances sont tout de même remarquables avec un 0 à 100 en 7.6 secondes, le kilomètre départ arrêté en 27.8 secondes et une vitesse de pointe de 230 Km/h.
Avec des trains roulants réajustés, cette propulsion devient un vrai jouet pour celui qui sais s'en servir, la berline est capable de figures acrobatiques qu'il vaudra mieux tempérer sur routes humides. Ici point d'assistances où d'aides à la conduite, vos seules béquilles seront la ceinture, le rail de sécurité et éventuellement un saint Christophe collé sur la planche de bord. Mais sur autoroute elle se montre comme le pâté, impérial!
Hélas pour elle, on va lui opposer quelques mois plus tard une M5 au tempérament bien différent et résolument tourné vers le sport. Cette dernière s'offre le bloc de la M1, il sort 286 chevaux et colle un gifle à la M535i, s'il n'avait pas laissé sa vie Porte de Clignancourt, sûr que Mesrine en aurait acheté une!
Vendue entre 1984 et 1987, la M535i s'écoulera à 9483 exemplaires.
Celle-ci date du 07 janvier 1986 et affichait 103.000 kilomètres. D'origine Française, elle présentait un état rare et ses jantes d'époque. A vendre, son propriétaire en demandait 19.800€, ce qui semble très correct pour une voiture aussi belle, rare et performante qu'est cette M535i. Sûr qu'aujourd'hui elle à fait un nouvel et heureux acquéreur.



